6 févr. 2014

Ils riaient

J'ai été sexuellement agressée. J'étais belle, libre, amoureuse, et c'est sans doute ce bonheur que "mes" agresseurs ont voulu éradiquer quand ils m'ont prise pour cible.

Je sortais du métro pour retrouver mon amoureux chez lui. C'était un bel après-midi d'avril, les premières chaleurs du printemps. Je souriais parce que j'allais retrouver celui que j'aimais. Enfin, je ne souriais probablement pas, c'était juste mon état intérieur. J'étais bien.
Je portais un pantalon fluide légèrement moulant, un top décolleté, un gilet sur mes bras croisés et mon sac à main. Aujourd'hui, je me justifie encore de la tenue que je portais. Oui j'étais jolie et probablement attirante. Est-ce que ça valait d'être attaquée ? Est-ce que c'est le feu vert que certains hommes comprennent pour s'octroyer le droit de prendre possession du corps des femmes ?

Je parle d'hommes, mais il s'avère que les hommes qui m'ont agressée étaient en fait des adolescents entre 14 et 16 ans environ.
Je marchais dans la rue, et j'ai eu la mauvaise idée de passer sur le trottoir en face d'eux. Je les avais repérés en amont. Ils étaient une petite bande, assis sur des bancs ou des barrières. Je ne les ai évidemment pas regardés, j'ai fait comme s'ils n'étaient pas là. Étaient-ils 3, 4, 5 ou plus ? Je n'arrive pas à me souvenir. Un seul était déjà de trop.

Arrivée en face d'eux, les premiers sifflements ont retenti. Je les ai ignorés. Mais peut-être qu'ils ont ressenti ma crispation et que ça les a excités ? Ces sifflements ont donné suite aux premières interpellations "Eh ! Eh !". J'ai commencé à avoir peur. Peut-être m'ont-ils dit d'autres choses mais mon corps et/ou mon subconscient ont probablement enclenché le réflexe de survie. Celui qui bloque certaines fonctions pour laisser l'organisme se concentrer que sur l'essentiel, c'est à dire vivre.

Je les ai ignorés de nouveau, poursuivant mon chemin. Je me souviens m'être dit de ne pas accélérer le pas de peur de les exciter encore plus. Un peu comme ce qu'on nous dit quand on parle des chiens agressifs. Il ne faut pas se mettre à courir, ça les excite. Je les ai entendus se dire des choses, comme des encouragements. J'ai prié pour qu'ils ne me poursuivent pas. Ils se sont mis à me poursuivre. Quand j'ai entendu leurs enjambés rapides dans mon dos, j'ai compris être devenue leur proie.

Dans leur course, ils se sont jetés sur moi. J'étais au mileu de la rue, à 10 mètres de chez mon petit-ami. Je croyais encore que j'allais m'en sortir, que des jeunes garçons de cet âge ne pouvaient pas avoir ce type de comportement. Quelle naïveté ...
Je ne suis pas tombée mais je me suis courbée. Leurs mains ont commencé à agressé mon corps. Je les sentais attaquer mes fesses. Je protégeais ma poitrine avec mon sac mais leurs mains forçaient le passage. J'essayais d'avancer. Je hurlais, je criais. Ça ne faisait qu'accroître leur excitation.

C'est si bon que ça de toucher le corps d'une femme qui vous hait ? Dites Messieurs les violeurs et agresseurs, c'est vraiment bandant de l'entendre vous supplier d'arrêter ? D'entendre sa voix se casser de trop crier ? Ou d'observer ses rictus horribles sur son visage ? C'est ça le sexe épanouissant pour vous ?

J'ai cru pouvoir me sauver en voyant l'espace minuscule entre les voitures garées sur le trottoir, et le bâtiment. C'est là que j'ai réussi à me faufiler tout en continuant à sentir leurs pattes d'enragés. En me recroquevillant, m'accroupissant, dos au mur, face contre la voiture, ils ne pouvaient plus avoir accès à mes parties intimes, à mes parties féminines, à ce qu'ils voulaient posséder contre ma volonté, me suis-je dit.
Malgré cela, ils ont réussi à passer leurs mains les uns après les autres sur moi. Tout du long, ils s'encourageaient, poussaient des cris, sans maîtrise, sans limite, comme des hyènes excitées par le déclin de leur proie. Et ils riaient.

Pendant que ces chiens me touchaient, j'ai cru ne jamais pouvoir m'en sortir. Ça durait et durait encore. Je suis tombée dans le silence. Je ne hurlais plus parce que j'avais l'impression d'être seule au monde et que de toute façon, personne ne pouvait m'entendre.
Mon cerveau a réussi à faire un calcul ultra-rapide, celui de la perte acceptable : soit je restais ainsi à subir leur assauts écœurants, soit je me relevais et prenais le risque de leur laisser encore plus accès à mon corps, mais en arrivant à entrer dans l'immeuble de mon petit-ami. Voilà comment, forcée,  j'ai négocié avec mon propre corps, ma propre conscience : perdre un peu de moi pour faire survivre le reste.

Alors je me suis relevée parce que je voulais survivre et que ça s'arrête. Ils étaient heureux de pouvoir profiter encore plus de ce que je ne leur avais jamais autorisé à faire. J'ai réussi à entrer dans l'immeuble et à sonner à l'interphone comme une dingue. Deux ou trois m'ont suivie à l'intérieur pour profiter jusqu'à la dernière goutte de mon être, puis se sont échappés, repus. Un dernier s'est mis à hurler sur moi "Qu'est-ce que tu fais ?". Sa question avait pour sens "Tu te prends pour qui à vouloir nous échapper et à alerter les gens ?". Il a fini en me donnant un grand coup de pied dans les jambes puis à fuir.

Je tremblais. Mon petit-ami est arrivé. Je me suis réfugiée chez lui.

Ça n'était pas un quartier sensible, ni un quartier déserté, mais je n'ai pas souvenir d'avoir vu des gens autour. Je ne peux en vouloir à personne de ne pas m'avoir aidée, car je ne suis même pas sûre que quelqu'un ait vu.

Après tant d'années, je me questionne toujours sur ce qui a pu provoquer cette horde de sauvages. Et je me questionne chaque jour quand je croise des hommes.


Est-ce qu'il aura envie de me toucher parce que mes cheveux tombent nonchalamment sur mes épaules ? Est-ce qu'il va avoir un geste déplacé parce qu'il aura cru à une invitation dans mon regard ? Est-ce qu'il va m'agresser parce que ma poitrine sera trop rebondie pour lui, ou trop visible dans mon décolleté ?

J'ai commencé à écrire cette note dans le train qui me ramenait chez moi. En me questionnant, la première chose que j'ai vue en sortant de la gare, c'est une publicité pour de la lingerie féminine, affichée ostensiblement derrière la vitre de l'abri-bus. Un buste de femme, parfaitement cadrée sur sa poitrine et ses hanches, sans tête. Ce que j'ai voulu conserver et protéger, est offert.

Ils riaient, et j'avais 16 ans.

22 janv. 2014

Logement : ce sera pour une prochaine vie

Cette semaine, j'ai regardé le documentaire de Amandine Chambelland et Linda Bendali intitulé "Le scandale du logement", diffusé sur France 2. Très bien structuré, il met en lumière les raisons complexes et intrinsèquement liées de la situation du logement en France.

J'ai particulièrement été interpellée par le passage concernant la vente à la découpe, ou comment BNP Paribas achète des résidences locatives entières à Paris et région parisienne, pour revendre chaque logement à des prix au m² bien plus élevés. Les locataires sont prioritaires sur l'achat de leur logement, mais aux prix affichés par BNP, beaucoup ne peuvent tout simplement pas se le permettre et se retrouvent à devoir quitter leur logement.
Un locataire qui avait à peu près mon âge expliquait que pour pouvoir acheter son logement dans la limite des 33% d'endettement maximale, il devrait prendre un prêt sur plus de 40 ans.

Evidemment, je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle entre les explications données dans ce documentaire et ma situation personnelle, et donc à relever que non seulement la situation du logement est véritablement scandaleuse, mais qu'en plus, les banques ne jouent plus leur rôle d'investisseur.

SITUATION ACTUELLE
Je suis en CDI à plein temps, avec un salaire de 1900 € nets/mois (x 12). Je vis avec mon fils en résidence alternée. Je n'ai aucun autre revenu ni aucune aide : ni CAF, ni pension alimentaire, ni revenu locatif, ni aide familiale. Je n'ai quasiment pas d'épargne (environ 2500 Euros sur un compte bloqué d'Epargne Entreprise) et j'ai un livret A qui doit avoisiner les 150 Euros. D'ailleurs, ma situation et mon salaire actuels ne me permettent pas d'épargner. Et lorsque je réussis à le faire, ça ne me sert pas à constituer un apport, mais à payer une réparation de voiture, couvrir une période de chômage ou régler une facture inattendue.

J'habite en grande banlieue parisienne, dans une petite ville plutôt bourgeoise.
Mon logement est un grand F2 dont le loyer va atteindre 800 €/mois dans les prochaines semaines (charges comprises). Mon loyer a augmenté tous les ans depuis la signature du bail. Mon taux d'endettement est de 42%, soit bien au-delà de 33%.

Depuis 7 ans que je dors dans le salon, mon fils devenant grand, il ne me semble pas tout à fait déconnant d'avoir envie de plus d'intimité, et de vouloir ma propre chambre. Mon souhait est de pouvoir rester dans ma ville, pour que mon fils continue d'y évoluer, de voir ses amis-es, de faire ses activités et d'y être scolarisé.

Et puis je pense à plus tard, quand je serai plus âgée, que mon fils sera grand ou parti, que les politiques mises en place et la crise financière ne me permettent pas d'avoir grand espoir quant au montant de la retraite que je toucherai. Je pense donc de plus en plus à me constituer une retraite privée.

PLAN A : LA LOCATION
Rester locataire est la situation qui semble la plus accessible dans mon cas. Sauf que pour un F3 dans ma ville, il faut compter au minimum 900 €/mois. Je n'ai évidemment pas la capacité de payer un tel loyer qui reviendrait à plus de 47% d'endettement.

PLAN B : L'ACHAT
L'achat semble être une solution plus qu'intéressante puisqu'en superposant les dépenses, le coût est approximativement le même qu'à la location, avec le gros plus d'avoir un bien à soi à la fin du prêt. Seulement, pour un F3 dans ma ville, il faut compter au minimum 160000 €.
Grâce à un rapide calcul fait sur les sites spécialisés, en prenant un prêt – hors frais de notaire - sur 30 ans à un taux de 4,3%, mes mensualités atteindraient 840 €. Mon taux d'endettement serait là de 44%.
Inutile de demander un prêt puisque ma demande ne sera même pas étudiée.

PLAN C : L'INVESTISSEMENT LOCATIF
Sachant que je n'ai pas les moyens de changer de logement à la location ou à la vente, que je dois donc rester dans mon logement actuel, j'ai pensé à l'investissement locatif.
Evidemment, il ne s'agirait pas de faire n'importe quoi, mais d'acheter un bien qui s'autofinancerait. Le montant du loyer couvrirait le montant de l'emprunt. Sans gagner d'argent pendant 20 ou 30 ans, au moins, à la fin, le bien m'appartiendrait.

J'ai donc contacté des courtiers en prêts immobiliers. La réponse est sans appel :
"Aucune banque ne vous prêtera d'argent."
"Pourquoi ?"
"Vous n'êtes pas propriétaire de votre logement actuel et vous n'avez quasiment pas d'apport. De plus, vous êtes déjà à plus de 33% de taux d'endettement, ça ne passera pas."
"Oui mais les loyers couvriraient le prêt. Et puis les risques seraient minimes puisque je prendrais une garantie loyers impayés."
"C'est un gadget qui n'est pas pris au sérieux par les banques".

LA DESILLUSION
Je suis en colère ! Non seulement l'organisation socio-économique actuelle ne me permet pas de changer de logement – pour rester dans quelque chose de raisonnable – mais en plus, elle me fait penser à des choses auxquelles je ne devrais même pas avoir à penser : me constituer ma propre retraite.

Je travaille depuis ma majorité. En dehors de quelques périodes d'inactivité, je cotise pour la retraite depuis 17 ans. Les différents choix politiques et économiques faits ces 30 dernières années ne me permettent même pas de travailler sereinement et de me dire que le jour où je serai trop âgée pour travailler, ou tout simplement parce qu'il sera temps pour moi de laisser la place aux jeunes, je n'aurai même pas de quoi en profiter, et je serai bien évidemment trop âgée pour obtenir un prêt.

D'un côté des pouvoirs politiques qui ne prennent pas les mesures nécessaires pour permettre aux gens de vivre décemment, et de l'autre des banques qui ne font plus que du travail de spéculation.


Comment croire encore en cette classe politique aussi lâche que complice ?

28 nov. 2013

Résidence alternée : mon expérience

Lorsque mon ex-mari et moi avons enclenché notre séparation, la résidence alternée (RA) a été une évidence aussi bien pour lui que pour moi. Ca n'était pas la meilleure solution, c'était la moins pire.
Ce choix a été une évidence pour nous, parce qu'il semblait être une évidence pour notre fils, qui avait 4 ans et demi. Il était aussi proche de son père que de moi, nous ne voulions pas le priver de l'un de nous, nous nous en occupions aussi bien l'un et l'autre et avions des situations professionnelles et financières similaires.

De cette décision ont découlé nos choix pour l'organisation de nos nouvelles vies respectives :
- Choix unique d'école pour la scolarisation
- Logements proches pour plus de praticité et de souplesse
- Doublement des affaires (jouets, habits) de notre enfant : nous n'avions plus que le doudou et les  traitements médicaux éventuels à emporter
- Chacun sa voiture (nous n'en avions qu'une) pour que chacun puisse être aussi libre que l'autre.

A préciser que nous avons pu mettre en œuvre cette organisation grâce à l'argent de la vente de notre appartement. Nous sommes redevenus locataires et avons évidemment perdu en pouvoir d'achat et en espace de vie.

Nos vies et celle de notre enfant ont évidemment été bouleversées par notre séparation, et aujourd'hui, au bout de pratiquement 7 ans à ce rythme, je pense avoir suffisamment de recul pour donner un avis plus tranché qu'à l'époque. Je parle d'un VRAI avis, pas de celles-ceux qui pensent et argumentent à coup d'études plus ou moins orientées mais qui ne vivent pas l'expérience. Il est par contre primordial de préciser que ce n'est que mon avis, et que je ne me fais pas porte-parole des parents divorcés, pères ou mères.

SEPARATION PREPAREE
Mon ex-mari et moi avions prévu la RA. Nous ne nous sommes pas mariés dans l'optique de divorcer. Mais tout comme les couples qui signent des contrats chez le notaire avant les noces "au cas où", nous avions évoqué le sujet du divorce – et donc de la résidence des enfants- "au cas où". Par conséquent, quand le problème s'est présenté, nous savions l'un et l'autre ce qui se passerait.
Nous avons préparé notre divorce pour éviter à notre fils de vivre inutilement des choses désagréables. Selon moi, il est du devoir d'un adulte responsable, potentiel futur parent, d'aborder le sujet de la séparation et de ne pas reléguer cela aux couples "qui ne sont pas sûrs", "qui ne sont pas solides", "qui ne peuvent pas s'engager pour de vrai", etc.
Au moment de la séparation de fait, nous avions tout bouclé, tout listé, tout décidé. Nous avons divorcé "à l'amiable", donc nous n'avions qu'une seule avocate pour deux, qui n'avait plus qu'à officialiser nos accords devant la loi (mais qui n'a pas lésiné sur ses honoraires soit dit en passant). Tout était partagé, acté, il n'y a eu aucune indemnité compensatoire, aucune bataille, pas de pension alimentaire puisque nous avions une situation financière identique. Le JAF n'avait plus qu'à nous convoquer pour vérifier qu'aucun de nous n'était lésé, et à valider.

VOLONTE
En tout premier lieu, la RA doit être une réelle volonté des deux parents, et pas quelque chose imposé soit par l'un des parents, soit par le JAF. Celui ou celle qui ne veut pas de la garde de son enfant, à plein temps ou mi-temps, le vivra mal, ce qui aura des répercussions évidentes sur l'enfant.

De plus, un homme ou une femme qui répète à l'envi "Je ne pourrai jamais laisser mes enfants" lorsqu'il-elle est encore en couple, a de grandes chances de refuser la RA. Ca ne veut pas dire qu'il-elle ne pourra pas changer d'avis en cours de route, mais c'est un signe de potentiel conflit futur. De même, un homme ou une femme pervers-e narcissique ne va pas faciliter les choses à sa moitié qui veut partir avec les enfants.

SOIN ET ATTENTION
Il y a certains parents qui ne sont tout simplement pas capables d'être parents. Ils ne savent pas s'occuper d'un enfant, ils ne savent pas passer du temps avec lui, l'éveiller, l'éduquer, l'accompagner dans son évolution. Donc sans couper l'enfant de son parent "carençant", il vaut mieux qu'il aille avec celui qui s'occupera le mieux de lui. Et je ne parle même pas des parents alcooliques, violents, manipulateurs, toxicomanes …

TEMPS
On peut être un parent formidable et attentif, et être tout simplement absent : un travail prenant, des voyages réguliers, des horaires de nuit ou en décalé … un enfant a besoin de repères et de routine, et de passer du temps avec ses parents. Donc vivre chez le parent qui fait appel systématiquement à papy-mamie, la tante, le cousin, la baby-sitter … pas sûre que ce soit très épanouissant.

ENTENTE
Les deux parents doivent IMPERATIVEMENT s'entendre et avoir une conception commune de l'éducation. Si les rancœurs rendent les relations exécrables, si les parents se disputent à la moindre occasion, même en l'absence des enfants, l'ambiance sera mauvaise et la moindre étincelle fera exploser les échanges.
De même, des différences trop importantes dans la gestion du quotidien va forcément faire pencher la balance vers le côté obscure. Un père qui couche ses jeunes enfants à 22h en semaine pendant que la maman les couche à 20h, ou une mère qui laisse ses enfants manger n'importe quoi n'importe quand pendant que le père préfère les horaires de repas plus rigoureux, c'est le terrain idéal pour des conflits entre les parents, et même avec les enfants qui vont forcément préférer être chez le parent le plus permissif.

COMMUNICATION
En plus d'une entente suffisamment bonne entre les parents, il faut aussi qu'il y ait du dialogue, et que les enfants constatent ce dialogue. Au moment de l'alternance, il faut se parler, se tenir au courant de ce qui s'est passé pendant la semaine, des projets évoqués, des dates de vacances. Il faut impliquer l'enfant tout en prenant les décisions importantes d'abord entre adultes.

DISTANCE
Comme vu plus haut, des parents habitant à plus de 15-20 minutes de voiture l'un de l'autre ne pourront pas gérer une RA dans les meilleures conditions. Que faire en cas d'oubli de doudou ? Et si le parent "en cours" est bloqué au bureau par une réunion ?
L'idéal est de vivre dans la même ville (mais dans des quartiers différents), ou dans des villes limitrophes.

FONCTIONNEMENT RIGOUREUX …
La RA doit se soumettre à des règles communes pour que les enfants se sentent le moins déstabilisé possible. On fixe un jour et une heure d'alternance (le vendredi après l'école, le dimanche à 18h …) et on s'y tient pour que les enfants puissent s'approprier cette routine.
Dans le cas de notre fils, l'alternance a lieu le dimanche à 19h, et nous partageons équitablement les vacances scolaires, les anniversaires et les fêtes une année sur deux.

… ET SOUPLE
Pour qu'une RA fonctionne bien, il faut des règles précises, mais aussi de la souplesse. Lors de week-ends prolongés, il arrive que l'un de nous demande l'accord de l'autre pour que notre fils rentre plus tard. Ainsi, si son père décide de partir lors d'un week-end de trois jours (samedi, dimanche, lundi), et si je n'ai rien prévu le lundi, je ne vois pas pourquoi je priverais mon fils et son père de rester une journée de plus ensemble.
De la même manière, il m'est déjà arrivé de devoir terminer ma journée de travail plus tard que prévu. J'ai appelé le papa pour qu'il aille chercher notre fils à l'école à ma place.
Tant que ce type d'arrangement reste ponctuel et discuté, c'est parfaitement acceptable.

QU'EN DIT LE PRINCIPAL INTÉRESSÉ ?
Notre fils est maintenant au collège. Il dit lui-même qu'il n'est pas prêt à arrêter la RA car il a besoin de nous voir tous les deux, mais il souffre quand-même de cette alternance car, et c'est bien naturel, il aimerait nous voir ensemble car nous lui manquons. Même si mon ex-mari et moi faisons le maximum pour atténuer les différences entre nos foyers, il y en a. Ça n'est donc pas tous les jours facile pour notre fils mais nous attendons qu'il soit prêt à choisir une résidence principale, s'il le souhaite. Il le fera peut-être d'ici quelques années, parce qu'il aura grandit et qu'il s'émancipera.

SI C’ETAIT A REFAIRE ?
Je le referais, différemment.
Il faut que je sois honnête : mon ex-mari et moi avons choisi cette alternative aussi pour ne pas souffrir de la séparation. Cela aurait été trop dur pour l'un ou l'autre de ne voir notre fils qu'un week-end sur deux. Cette souffrance aurait peut-être engendré des rancœurs envers le parent en résidence principale. Nous ne voulions pas ajouter du conflit au conflit.
Pouvant être honnête aujourd'hui quant à cet aspect, et en prenant en compte l'âge de notre fils à l'époque, je choisirais la résidence alternée pour nous les parents, et pas pour l'enfant. Au lieu de quitter un F3 à 900 €/mois et de prendre deux F2 à 700 €/mois chacun, nous aurions dû garder notre F3 et prendre un studio. Ainsi, notre fils aurait pu conserver sa chambre, ses affaires, son environnement, ses habitudes, et à nous, parents, adultes et responsables de la situation, de prendre nos dispositions et d'assumer nos choix.
Evidemment, cela aurait été une situation à court ou moyen terme, car lorsque l'un des parents veut refaire sa vie, se pose un autre choix de vie. De plus, à un moment donné, l'enfant doit également comprendre que les parents ne sont plus ensemble.

CONCLUSION
Je suis pro-RA sous conditions strictes, donc contre la systématisation de la RA car je considère que certains facteurs sont essentiels pour que cela puisse convenir (cf. plus haut).

Je suis viscéralement féministe, ce qui signifie pour moi une stricte égalité dans les droits et devoirs des femmes et des hommes – et qui justifie mon combat contre toutes les formes de sexisme - MAIS je ne suis pas pour une RA automatique, telle que revendiquée par certaines associations de pères.

Je ne déplore pas que les enfants soient quasi-systématiquement confiés aux mères. Non que ça me plaise, mais je crois tout simplement que c'est une réponse historique et naturelle à notre société patriarcale (un père est fort, puissant, doit travailler tard, a d'autres choses à faire que de s'occuper de la maison et de changer les couches …) dans laquelle nous vivons.
Ce qui est déplorable donc, c'est la manière dont les femmes sont traitées dans notre société. Si les hommes investissaient le foyer à égalité avec les femmes (partage des tâches), si les hommes décidaient d'abandonner leurs privilèges d'hommes pour laisser aux femmes la place qu'elles devraient avoir dans tous les pans de la société (en politique, dans les entreprises, dans la culture …), eux-mêmes en tireraient des bénéfices par extension.


Non seulement je suis quasi-certaine qu'il y aurait moins de séparations, mais les pères pourraient prétendre à la RA au même titre que les femmes, tout simplement parce que tout le monde serait considéré comme égal.

9 nov. 2013

Le 9 du mois

Quand tout à chacun sort du frigo ce qu'il a envie de manger, va au resto parce qu'il a la flemme de cuisiner, moi je comptabilise ma consommation alimentaire, à l'unité près. Par exemple, au lieu d'utiliser quatre œufs pour une omelette de deux personnes, je n'en prends plus que trois. Ce qui est normal devient un trop grand luxe.

Les courses, c'est forcément chez Lidl. Je n'y trouve pas tout, mais ça n'est pas plus mal car j'évite le superflu. Je ne prends que ce dont j'ai besoin, ce qui limite les dépenses. Quand il y a superflu, c'est voulu. Par exemple, pour l'anniversaire de mon enfant, j'ai acheté de quoi faire des hamburgers maison puisque c'est ce dont il avait envie. Mais en déambulant dans les rayons avec lui pour chercher les articles, j'imaginais déjà les Euros s'échapper de mon compte bancaire. Il a fallu, comme à chaque fois que mon enfant fait les courses avec moi - ce que j'évite le plus possible - que je garde le sourire et l'enthousiasme de faire un petit repas exceptionnel, et ravaler la boule au ventre.
Si le dîner d'anniversaire de mon enfant coûte 15 Euros, alors ce sera 15 Euros en moins pour le mois. Sans compter les 10 Euros que j'ai dépensés pour acheter son cadeau (une BD). Voilà le budget superflu du mois déjà trop élevé, et pourtant tellement essentiel quand on est parent.

Ce soir, ce sera petits pois-carottes avec une cuillère de crème fraîche et un bâtonnet de poisson pané pour moi en plat principal (trois bâtonnets pour mon enfant), et deux rondelles d'ananas au sirop pour le dessert.
Mon enfant retournera chez son père demain. J'en arrive à être soulagée qu'il reparte là-bas, parce que je sais qu'au moins, il pourra mieux y manger, avoir le choix, et je pourrai continuer à me priver sans faire semblant.

- Maman, viens, on partage.
- Non, ça ira pour moi.
- On est deux, il faut qu'on partage en deux.
- C'est gentil mais je n'ai pas trop faim ce soir.

Mon frigo est vide. Pour demain, je n'ai plus de yaourt, plus de compote pour le dessert. Je vais devoir faire preuve de créativité avec un litre de lait et du gélifiant.
Pour le petit-déjeuner, ce sera de la bouillie faite à base de lait, farine et chocolat en poudre.
Pour le déjeuner, ce sera patates transformées en pommes dauphine, et un steak haché pour lui. Pas de steak haché pour moi il va sans dire.
Pour le goûter, il aura les petits biscuits secs que j'avais préparés en avance et deux tranches d'ananas. J'en prendrai quand-même avec lui.
Quand il sera rentré chez son père, je me ferai des pâtes le soir, avec fromage râpé et ketchup pour que ce soit moins fade.

Quant au reste de la semaine, ce sera les fonds de tiroirs, les restants de cette semaine, les lentilles du bas du placard, le poisson que mon enfant n'aime pas, et un dîner chez un pote qui m'héberge parce que je fais un inventaire près de chez lui. Il sait ce que je vis, il va m'offrir le gite et le couvert pour une soirée. Je ne sais pas comment le remercier pour tout ce qu'il fait déjà pour moi.

En journée, j'arrive à ne pas dépenser plus de 2 Euros par repas à la cantine du boulot, et je fais quelques réserves en douce quand des collègues apportent des viennoiseries ou des petites douceurs. Il m'est déjà arrivé de me nourrir de chocolats de Pâque pour éviter d'utiliser ma carte de cantine.
Mais le mieux, c'est quand il y a des réunions avec des plateaux-repas. Avec un peu de chance, certains-es n'ont pas pris leur fromage ou leur dessert, ou bien n'ont pas du tout pris leur plateau que je peux récupérer. L'autre fois, j'ai pu inviter une copine à dîner à la maison grâce à cette récup'.

Quand je suis seule, j'arrive à me serrer la ceinture le plus possible. Par contre, j'essaie de garder un semblant de normalité quand mon enfant est là. Malgré ça, il n'est pas dupe. Il voit ce qui se passe. Déjà, il m'entend parler d'argent beaucoup plus souvent, me voit toujours plus tendue. Et puis quand je dis clairement que "Je ne peux pas", il ne pose pas de questions.

Ce qui est difficile à digérer, c'est quand j'apprends par hasard qu'il refuse de faire une liste de ce qu'il voudrait pour son anniversaire pour ne pas que je dépense pour son cadeau. Et quand je le questionne, il me dit qu'il n'a besoin de rien.

Il faut tenir quand il sourit pour essayer de dissimuler sa peine, sa culpabilité d'être à ma charge.


6 nov. 2013

Assistant social : l'espoir et le néant

J'ai rencontré un assistant social pour la première fois de ma vie.

Depuis des mois je survis, je me prive, compte, recompte, sacrifie, jongle, réduis, étouffe, suffoque. En moyenne, je dépense 160 Euros par mois de courses. Cette somme ne prend pas en compte la cantine de mon fils, ni celle de mon entreprise.

Voyant que la situation devenait de plus en plus difficile, une de mes amies m'a parlé de l'épicerie sociale de la ville, qu'elle fréquentait en secret depuis des mois. Elle aussi était dans une situation difficile (célibataire, au chômage avec peu ou pas d'indemnités du fait de son statut particulier). Elle s'est décidée à demander un rendez-vous avec un-e assistant-e social-e. Grâce à cela, elle a pu bénéficier de l'épicerie sociale, et se fournir en produits alimentaires pour un coût amoindri. De honte, elle n'en avait parlé à personne, ni à ses parents, ni à son petit-ami.

Imaginant que je pouvais faire de réelles économies sur mon budget courses, je me suis résolue à prendre rendez-vous avec un-e assistant-e social-e. Mais j'avais du mal à décrocher mon téléphone. Demander un tel rendez-vous, quand on est adulte indépendant, en CDI à plein temps, mère de famille, ça fait mal. Peut-être qu'il s'agit de fierté mal placée, soit ! Mais ça fait mal quand-même, surtout quand on est censé gagner suffisamment sa vie pour ne pas avoir à peser sur la solidarité nationale. Je repoussais cet appel, essayant de me convaincre que j'allais peut-être m'en sortir sans aide.

Il faut que j'attende, on ne sait jamais, le mois prochain ça ira mieux ...

Et puis j'ai réussi à appeler.

J'ai calé cet entretien pendant un jour de RTT. Réduction du Temps de Travail : délicieuse invention à condition de pouvoir clairement en profiter. Attention, je ne suis absolument pas contre les 35h, bien au contraire, et je serais même pour une réduction du temps de travail à 32 heures hebdomadaires (dans le cadre d'une refonte en profondeur de notre système). Mais cela fera peut-être l'objet d'un autre article. C'est juste que je me dis que ce temps de repos devrait nous permettre de profiter de la vie, pas de se confronter encore une fois à la misère économique.
Voilà, c'était juste une petite parenthèse.

Cette rencontre a eu lieu dans le bureau de l'assistant social, un peu à l'arrache car il avait une réunion en parallèle. Mais, à sa décharge, il a quand-même pris le temps de me recevoir et de s'entretenir avec moi.
Je lui ai exposé ma situation. Nous avons fait le tour de mes revenus, de mes dépenses, de mes charges, de ma situation, pour en venir au sinistre fait que je n'avais pas le droit d'accéder à l'épicerie sociale. Je gagne juste ce qu'il faut pour intégrer la catégorie exclue. Ca, c'est le triste sort de la classe moyenne-basse. Persuadée que même minime, cette aide allait m'être octroyée, je me suis retrouvée démunie.

Voyant mon désarroi, l'assistant social a abordé mes dépenses et m'a conseillé de faire une demande de logement social vu que mon gros poste de dépense concerne mon logement. Evidemment, cette demande de logement a déjà été faite et est toujours en cours.
Il a ensuite abordé mes revenus, et les différentes possibilités de les augmenter :
  • Avoir un job d'appoint : je fais déjà des inventaires de temps en temps.
  • L'entraide familiale : quand on est fâché avec sa famille, impossible.
  • Une pension alimentaire : comment justifier à mon ex-mari une demande de pension alimentaire alors que notre fils est en garde alternée, que nous partageons tous les frais à 50/50 et que nous gagnons approximativement la même chose ? Certes, mon ex-mari a refait sa vie et sa compagne a un salaire équivalent au sien, mais je trouverais ça très malhonnête d'exiger d'avoir une pension alimentaire sous ce prétexte. Il gagnerait deux ou trois fois plus que moi, mon point de vue serait probablement différent. Mais en gros, je lui retirerais du pouvoir d'achat pour augmenter le mien, et notre relation - qui est plutôt bonne depuis notre séparation - deviendrait délétère. Hors de question.

Constatant l'impasse, il m'a alors conseillée de relancer la mairie pour ma demande de logement. "Il faut être présent, mais pas pressant. Des mères-célibataire en CDI qui veulent s'en sortir, c'est le profil préféré des offices HLM", m'a-t-il dit. Ah ok. J'ai donc relancé la mairie, et reçu une réponse de leur part indiquant que le parc est difficile d'accès, blabla, qu'ils sont conscients de ma situation, blabla, qu'il faut attendre, blabla.


Aujourd'hui, je continue à me priver, compter, recompter, sacrifier, jongler, réduire, étouffer, suffoquer …

5 nov. 2013

Shiva, spécialiste de l'impeccable ... et du sexisme ?

Shiva est une entreprise proposant des services d'aide à domicile : repassage, ménage, garde d'enfant ...
Leur campagne de pub est tout simplement effrayante puisqu'il n'y a aucun homme représenté sur leur visuel :