6 nov. 2013

Assistant social : l'espoir et le néant

J'ai rencontré un assistant social pour la première fois de ma vie.

Depuis des mois je survis, je me prive, compte, recompte, sacrifie, jongle, réduis, étouffe, suffoque. En moyenne, je dépense 160 Euros par mois de courses. Cette somme ne prend pas en compte la cantine de mon fils, ni celle de mon entreprise.

Voyant que la situation devenait de plus en plus difficile, une de mes amies m'a parlé de l'épicerie sociale de la ville, qu'elle fréquentait en secret depuis des mois. Elle aussi était dans une situation difficile (célibataire, au chômage avec peu ou pas d'indemnités du fait de son statut particulier). Elle s'est décidée à demander un rendez-vous avec un-e assistant-e social-e. Grâce à cela, elle a pu bénéficier de l'épicerie sociale, et se fournir en produits alimentaires pour un coût amoindri. De honte, elle n'en avait parlé à personne, ni à ses parents, ni à son petit-ami.

Imaginant que je pouvais faire de réelles économies sur mon budget courses, je me suis résolue à prendre rendez-vous avec un-e assistant-e social-e. Mais j'avais du mal à décrocher mon téléphone. Demander un tel rendez-vous, quand on est adulte indépendant, en CDI à plein temps, mère de famille, ça fait mal. Peut-être qu'il s'agit de fierté mal placée, soit ! Mais ça fait mal quand-même, surtout quand on est censé gagner suffisamment sa vie pour ne pas avoir à peser sur la solidarité nationale. Je repoussais cet appel, essayant de me convaincre que j'allais peut-être m'en sortir sans aide.

Il faut que j'attende, on ne sait jamais, le mois prochain ça ira mieux ...

Et puis j'ai réussi à appeler.

J'ai calé cet entretien pendant un jour de RTT. Réduction du Temps de Travail : délicieuse invention à condition de pouvoir clairement en profiter. Attention, je ne suis absolument pas contre les 35h, bien au contraire, et je serais même pour une réduction du temps de travail à 32 heures hebdomadaires (dans le cadre d'une refonte en profondeur de notre système). Mais cela fera peut-être l'objet d'un autre article. C'est juste que je me dis que ce temps de repos devrait nous permettre de profiter de la vie, pas de se confronter encore une fois à la misère économique.
Voilà, c'était juste une petite parenthèse.

Cette rencontre a eu lieu dans le bureau de l'assistant social, un peu à l'arrache car il avait une réunion en parallèle. Mais, à sa décharge, il a quand-même pris le temps de me recevoir et de s'entretenir avec moi.
Je lui ai exposé ma situation. Nous avons fait le tour de mes revenus, de mes dépenses, de mes charges, de ma situation, pour en venir au sinistre fait que je n'avais pas le droit d'accéder à l'épicerie sociale. Je gagne juste ce qu'il faut pour intégrer la catégorie exclue. Ca, c'est le triste sort de la classe moyenne-basse. Persuadée que même minime, cette aide allait m'être octroyée, je me suis retrouvée démunie.

Voyant mon désarroi, l'assistant social a abordé mes dépenses et m'a conseillé de faire une demande de logement social vu que mon gros poste de dépense concerne mon logement. Evidemment, cette demande de logement a déjà été faite et est toujours en cours.
Il a ensuite abordé mes revenus, et les différentes possibilités de les augmenter :
  • Avoir un job d'appoint : je fais déjà des inventaires de temps en temps.
  • L'entraide familiale : quand on est fâché avec sa famille, impossible.
  • Une pension alimentaire : comment justifier à mon ex-mari une demande de pension alimentaire alors que notre fils est en garde alternée, que nous partageons tous les frais à 50/50 et que nous gagnons approximativement la même chose ? Certes, mon ex-mari a refait sa vie et sa compagne a un salaire équivalent au sien, mais je trouverais ça très malhonnête d'exiger d'avoir une pension alimentaire sous ce prétexte. Il gagnerait deux ou trois fois plus que moi, mon point de vue serait probablement différent. Mais en gros, je lui retirerais du pouvoir d'achat pour augmenter le mien, et notre relation - qui est plutôt bonne depuis notre séparation - deviendrait délétère. Hors de question.

Constatant l'impasse, il m'a alors conseillée de relancer la mairie pour ma demande de logement. "Il faut être présent, mais pas pressant. Des mères-célibataire en CDI qui veulent s'en sortir, c'est le profil préféré des offices HLM", m'a-t-il dit. Ah ok. J'ai donc relancé la mairie, et reçu une réponse de leur part indiquant que le parc est difficile d'accès, blabla, qu'ils sont conscients de ma situation, blabla, qu'il faut attendre, blabla.


Aujourd'hui, je continue à me priver, compter, recompter, sacrifier, jongler, réduire, étouffer, suffoquer …

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